Le SIBO, pas si beau !

Le SIBO, pas si beau !

9 mai 2023

Avez-vous déjà entendu parler ou lu sur ce sujet? Si vous souffrez du syndrome de l’intestin irritable, avez des symptômes intestinaux non diagnostiqués ou des ballonnements au quotidien, il y a de fortes chances que ce terme vous soit familier, quoi qu’encore il est assez peu connu au sein des communautés de professionnels de la santé qui n’œuvrent pas ou peu dans le domaine de la santé digestive.

Le SIBO est l’abréviation pour Small Intestinal Bacterial Overgrowth. Il s’agit d’une pullulation bactérienne à l’intestin grêle qui apporte un ensemble de symptômes non spécifiques de nature majoritairement digestive. Ayant développé une expertise pointue en la matière, cet article vous permettra d’avoir une vue d’ensemble et détaillée des informations importantes à considérer dans un contexte de SIBO.

En termes simples, en contexte de SIBO, il y a trop de bactéries à un endroit dans l’intestin grêle qui ne devrait pas en contenir autant. Ces bactéries, de type protéobactéries à gram négatif, sont capables de produire des gaz par fermentation ce qui entraîne évidemment beaucoup de symptômes:

👉🏻 Ballonnements abdominaux sévères;
👉🏻 Distension abdominale/douleurs abdominales;
👉🏻 Gaz intestinaux, éructations (« rots »);
👉🏻 Nausées, vomissements;
👉🏻 Diarrhée;
👉🏻 Constipation;
👉🏻 Fatigue/brain fog ou brouillard mental.

Ces symptômes ressemblent étrangement à ceux du syndrome de l’intestin irritable (SII). Selon les données actuelles, jusqu’à 2/3 des gens atteints de SII seraient également atteints du SIBO. Le tronc commun de ces deux problématiques est une dysbiose ou un déséquilibre du microbiote intestinal, une augmentation de la perméabilité intestinale communément appelée leaky gut, en plus de la présence d’une inflammation chronique.

Non seulement le SIBO est difficile à diagnostiquer, mais également laborieux à traiter. Et par surcroît, il y a un manque de consensus médical sur les démarches à suivre.

En principe, pour le diagnostic, on ferait une aspiration du liquide au niveau du duodénum ou jéjunum (début de l’intestin grêle) et on analyserait ce liquide en termes de quantité de bactéries. Si sa concentration est de plus de 103 UFC/ml, vous voilà avec un diagnostic assez clair et précis. Dans les faits, cette mesure est coûteuse et invasive. Mise à part dans certains protocoles de recherche, l’accessibilité à ce test est extrêmement limitée.

À ce jour, le test respiratoire ou Breath test est utilisé. Avec celui-ci on mesure les niveaux de gaz (hydrogène, méthane, sulfure d’hydrogène) expirés avant et après l’ingestion de glucose ou lactulose. Ce test se base sur le fait qu’à part le CO2, les cellules humaines ne produisent pas de méthane, d’hydrogène ou de sulfure d’hydrogène. Ce sont les bactéries qui les produisent à la suite d’une fermentation. Conséquemment, plus il y a de ces gaz expirés par la bouche à la suite de l’ingestion de ces sucres, plus on pourrait penser qu’il y a une surcroissance bactérienne au niveau de l’intestin grêle.

Malheureusement, à ce jour, ces tests sont peu fiables, c’est-à-dire que leur niveau de sensibilité et de spécificité sont faibles. On a donc souvent des « faux positifs », c’est-à-dire des SIBO qui seraient identifiés sans que ce soit réellement le cas. Il faut noter que cela reste tout de même le seul test à ce jour disponible et proposé dans les lignes directrices de certaines associations médicales dont l’American College of Gastroenterolgy. L’expérience clinique devient alors un atout essentiel pour aider les gens qui souffrent de cette problématique, afin de les guider vers la bonne option et les bons professionnels pour les soutenir dans leur démarche.

Quelques indicateurs et symptômes sont associés à un risque supérieur de SIBO, sans pour autant être un lien de cause à effet :

✔️ Âge avancé et sexe féminin;
✔️ Troubles de la motricité intestinale: SII, gastroparésie, dyspepsie fonctionnelle;
✔️ Dysfonction des nerfs ou des muscles intestinaux;
✔️ Maladies auto-immunes ou à médiation immunitaire: ex. diabète, maladie cœliaque non traitée, maladies inflammatoires de l’intestin (MII), hypothyroïdie, sclérose en plaques, fibromyalgie;
✔️ Prise de certains médicaments: opioïdes, anti diarrhéiques, anticholinergiques;
✔️ Obstruction partielle ou intermittente de l’intestin grêle, altérations chirurgicales du tractus gastro-intestinal: ex. chirurgie bariatrique;
✔️ Diverticules de l’intestin grêle, sténose, fistule;
✔️ Une faible acidité gastrique : ex. prise d’IPP, âge avancé, consommation régulière d’antiacides.

Concernant ce dernier point, il est reconnu que l’acidité gastrique joue un rôle important dans la prévention de la surcroissance des bactéries dans le tractus digestif haut.

Les inhibiteurs de pompe à protons (IPP) de type Pantoloc/Dexilant/Nexium/Prevacid/Losec font partie de votre vie depuis de nombreuses années ? Une étude a démontré que vous avez 3 fois plus de risques de développer un SIBO. Toutefois, il n’est pas possible de déterminer à ce jour la dose, la durée et le type d’exposition qui ont un effet sur ce risque.

Sans faire partie intégrante de la démarche diagnostique du SIBO, voici quelques éléments qui peuvent amener le clinicien à se questionner et à pousser sa démarche ou son investigation.

Des phrases telles que « Je gonfle après un verre d’eau » ou « J’ai l’air enceinte de 5 mois le soir » sont entendues régulièrement en contexte de SIBO. Encore une fois, rien de cela mène vers un diagnostic, mais peut nous mettre sur la piste.

Une fois le SIBO identifié et diagnostiqué, qu’est-ce qu’on fait ?

Idéalement, on traite. Le médecin peut prescrire un antibiotique sur une durée de 14 jours, pour enrayer la prolifération bactérienne. Le type d’antibiotiques variera en fonction du type de SIBO (hydrogène ou méthane) et de la symptomatologie du patient. Les récidives sont malheureusement très fréquentes (44% dans les 9 mois post-antibiothérapie), surtout si on n’a pas réussi à trouver la réelle cause du SIBO, celui-ci n’étant qu’un symptôme découlant d’un autre problème qui doit être identifié.

Encore une fois, le travail en interdisciplinarité prend toute son importance.

Quel est le rôle de la nutrition dans le traitement du SIBO ?

✨ Gestion des symptômes;
✨ Maintien d’une saine relation avec les aliments;
✨ Combler les besoins nutritionnels;
✨ Corriger les déficiences nutritionnelles, s’il y a lieu.

La nutrition permettrait également d’augmenter la durabilité du traitement d’antibiotiques dans le but d’aider à prévenir les récidives.

Le domaine étant assez jeune au plan des données probantes, il n’y a pas de diète spécifique qui a été validée scientifiquement, afin de traiter ou de prévenir le SIBO.

Vous lirez ou entendrez des mots tels que Low-fermentation diet, Specific carbohydrate diet, Biphasic diet ou SIBO specific food guide, mais il faut savoir que toutes ces diètes sont basées sur l’expérience clinique patient et n’ont pas encore fait l’objet d’études. Est-ce qu’on les discrédite pour autant ? Cela dépend. Le problème est souvent que ces diètes sont très restrictives. Résultats : on ne mange presque plus rien et la relation avec la nourriture devient malsaine, la peur de manger et de réagir est également très présente. La variété alimentaire diminue peu à peu et on tombe dans un cercle vicieux en devenant encore plus réactif à tout ce que l’on mange. Le mieux est évidemment de se faire accompagner par une nutritionniste qui s’y connaît ! Nous y sommes habituées, avons développé cette expertise, tout comme nous travaillons en collégialité avec les médecins et gastroentérologues dans ce suivi qui se doit de vous être personnalisé.

PRISE DE RENDEZ-VOUS

La majorité des pistes d’interventions nutritionnelles proviennent de celles réalisées en contexte du syndrome de l’intestin irritable qui consistent à limiter les glucides fermentescibles/FODMAP et à trouver les bonnes familles de fibres qui conviennent à votre confort. On veut « affamer » le surplus de bactéries tout en s’assurant de ne pas nuire à la qualité globale de votre microbiote intestinal.

Une nutritionniste de notre équipe pourra vous aider à établir le meilleur plan de match pour vous : quantité et qualité de glucides, espacement optimal entre les repas, hydratation, validation d’autres intolérances ou sensibilités alimentaires, utilisation de suppléments alimentaires s’il y a lieu, etc. Elle pourra également vous guider dans le processus avec votre médecin traitant ou médecin spécialiste au besoin.

N’hésitez pas à poursuivre la conversation avec nous en nous écrivant.

Nous avons conçu une formation médicale sur le sujet; n’hésitez pas à vous informer afin que nous puissions en discuter plus amplement.

Références

📙 FODMAPs and Irritable Bowel Syndrome (2019) Monash University https://www.monashfodmap.com/about-fodmap-and-ibs/.
📙 Pimentel M, Saad RJ, Long MD, Rao SSC. ACG Clinical Guideline: Small Intestinal Bacterial Overgrowth. Am J Gastroenterol. 2020 Feb;115(2):165-178.
📙 Pimentel M, Rezaie A. (2022) The microbiome connection Your guide to IBS, SIBO and low-fermentation eating
📙 Rao SSC, Bhagatwala J. Small Intestinal Bacterial Overgrowth: Clinical Features and Therapeutic Management. Clin Transl Gastroenterol. 2019 Oct;10(10):e00078.
📙 Scarlata K. (2022) Small Intestinal Bacterial Overgrowth Update + Overview: Treatments, Testing and Current Approaches to Managing Symptoms.
📙 Scalata K. (2021) SIBO Primer: What it is + How to treat et SIBO: Practical nutrition intervention and clinical pearls Dietitian Depp Dive.